Quand on avait rendez-vous avec Christian Fechner, son assistante, Claudine à l’époque, vous accueillait avec une gentillesse extrème à la société de production de Boulogne Billancourt : vous étiez dans un autre monde… Moquette épaisse rouge, affiches des films du producteur encadrées aux murs, de plus en plus serrées car de plus en plus de films. L’escalier en métal doré vous conduisait à l’étage de l’homme si convoité dans le domaine de la magie. Nous prenions place dans des fauteuils, tandis que Christian Fechner prenait systématiquement un « barreau de chaise » qu’il n’allumait jamais : il portait entre ses lèvres ce cigare, le recoupait de temps en temps et parlait doucement.
C’était l’époque de son film « Elisa », de Jean Becker, avec Vanessa Paradis et Gérard Depardieu : il nous avait d’ailleurs convié à la première… Discret, Christian Fechner avait pourtant une culture et une connaissance de la magie sans pareil. Le cinéma et la magie étaient ses passions. Sa collection de magie, unique au monde, avait eu sa place dans la Maison de la Magie de Blois, l’année de son ouverture. Malheureusement, les gestionnaires de cet équipement touristique et culturel se souciaient peu de l’hommage à Jean-Eugène Robert-Houdin : Christian Fechner se senti trahi (sans doute à juste titre) et reprit sa collection.
Il a comptabilisé des millions d’entrées dans les salles de cinéma et des millions de recettes. Pour la magie, il ne comptait pas. Il avait été sacré deux fois champion du monde en 1979 au Congrès mondial de la magie, il a créé des illusions pour Siegfried and Roy et pour David Copperfield et il écrivait des livres sur le sujet.
Exigeant, discret, réfléchi mais aussi instinctif, esthète, attachant… assurément atypique. Il est mort mercredi matin, à 64 ans des suites d’un cancer.